Pour en finir avec le SWOT (ou, pourquoi on trouve ça inutile…)

Le SWOT fait invariablement parti du cours marketing ou stratégie 101.  Il est aussi, pour plusieurs, une « preuve » qu’on a bien fait ses devoirs…  Pour nous, c’est une approche qui augmente les risques de se conter des histoires et de travailler sur les mauvaises choses. Voici pourquoi…

Tout le monde peut trouver 15 forces et 26 faiblesses… 

Le modèle de réflexion SWOT permet de porter un regard sur des éléments internes comme les forces de l’entreprise (Strengths), ses faiblesses (Weaknesses) et des éléments externes, comme les opportunités (Opportunities) ainsi que les menaces qui pèsent sur elle (Threats).

Née dans les années 60 au Harvard Business School dans la tête de quatre professeurs (Learned, Christensen, Andrews et Guth), cette méthode d’analyse porte aussi (mais rarement) le nom de « Méthode LCAG » ou « Harvard Model ».

Traditionnellement, une entreprise qui s’embarque dans une analyse SWOT dessinera 4 quadrants, dans lesquels elle listera bêtement, à la queue leu leu, toutes ses forces, toutes ses faiblesses, toutes les opportunités (qu’elle connaît) et toutes les menaces (qu’elle connaît).

Bien qu’il s’agisse d’une activité intellectuelle intéressante, elle aide peu lorsque vient le temps d’élaborer (et de mettre en œuvre) une stratégie d’entreprise. Le danger est que l’on se gonfle le torse avec nos 68 forces et que l’on se démotive avec nos 59 faiblesses, qui, disons-le, n’ont peut-être aucun lien avec la stratégie d’entreprise.

Comme dit Ben Gilad, professeur à l’Academy of Competitive Intelligence, l’acronyme « SWOT » pourrait être remplacée par « Stupid Way Of Thinking ». En effet, la question centrale est la suivante : à quoi bon faire la liste de toutes ses forces et de toutes ses faiblesses si la plupart d’entre elles n’ont rien à voir avec notre stratégie?

Voilà le problème : les entreprises (et leurs consultants) passent beaucoup trop de temps à faire une liste d’épicerie de leurs forces et de leurs faiblesses alors qu’elles n’ont pas encore idée de la forme qu’aura leur stratégie d’affaires. Beaucoup de temps passé pour peu de résultats utiles.

Réfléchir à l’envers pour travailler sur ce qui est vraiment utile : la création de valeur

Inversons maintenant les choses et voyons la question d’une façon plus positive et plus proactive : quelle est notre stratégie et quels seront les atouts et les compétences que nous devons développer afin d’atteindre notre orientation? Posée dans cet ordre, la mise en œuvre est plus concrète. Pensons d’abord à notre stratégie et nos orientations et ensuite, demandons-nous ce que nous aurons besoin pour l’atteindre.

En bout de ligne, des 127 forces et faiblesses que nous avons listées, peut-être que 4 ou 5 sont vraiment critiques pour le développement de l’entreprise. Et certainement que les 123 autres n’ont pas vraiment d’importance.

Dans une moindre mesure, à peu près le même raisonnement s’applique aux opportunités et aux menaces. Autrefois, dans les années 70, on faisait du « Environment Scanning », où l’on faisait encore la liste de toutes les menaces et les opportunités pour l’entreprise, qu’elles soient très peu probables ou presque certaines, qu’elles aient un impact ou non.

Nous ne disons pas qu’il ne faut pas tenir compte des opportunités ni des menaces qui tournent autour de l’entreprise, mais il est tout à fait inutile de passer son temps à s’inquiéter sur de grandes tendances trop macro qui ont trop peu de chances de se matérialiser et qui n’auront aucun impact sur l’entreprise. L’exercice de connaître les opportunités et les menaces doit certes être fait avec sérieux, mais c’est une question d’équilibre. Peut-être que 3 ou 4 menaces sont à considérer et à peu près le même nombre d’opportunités sont susceptibles de se réaliser.

En bout de piste, posons-nous les bonnes questions dans l’ordre. Où voulons-nous aller? Et qu’avons-nous besoin pour que nos orientations se concrétisent? Et qu’est-ce qui risque d’avoir un impact réel sur l’entreprise et sa pérennité

 

JFP  (Jean-François Pelley est directeur du service d’intelligence de marché du Groupe Dancause et peut être rejoint au – jfpelley@dancause.net).

 

 

 

 

 

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